Je vous présente ici une turbine que j'ai conçue et réalisée il y a 2 années, sa fonction est de recharger un parc de batteries de 12 kWh conjointement à 2 chaînes de panneaux solaires de 600 Watts chacun, disposés au Sud et à l’Ouest. La chaîne Sud est quasiment inopérante l'hiver, car recouverte par la neige.
La turbine fonctionne 24h/24 sauf durant la période estivale d’été. Durant ces deux années, elle aura produit un peu plus d’1 MWh et sa roue de 100 mm aura parcouru pas moins de 300 000 km en développé, soit 5 fois le tour de la terre !
Présentation de la turbine
Je dispose d’un débit de 0,6 l/s sous 4 bars de pression (effectif), l’eau sous pression arrive dans la cave du chalet par l’intermédiaire d’un tuyau en PE de 19 mm de diamètre intérieur. La topologie du site est expliquée ici et les pertes de charges de la conduite sont détaillées ici.
La turbine est construite autour d’une roue Pelton de 100 mm de diamètre. Elle entraîne un servo-moteur type KY80AS0404-15 (48V-400W-1500rpm) monté verticalement.
Deux injecteurs, diamétralement opposés, de 4,8 mm de diamètre intérieur, mettent en rotation la roue.
L’ensemble est soutenu par un carter qui s'apparente à une boîte inversée mesurant 200 x 200 mm de côté et 100 mm de haut. Le carter est réalisé en acrylique de 10 mm d'épaisseur, assemblé par collage.
Deux "lumières" permettent d’ajuster finement les supports injecteurs en hauteur afin que les jets s’alignent parfaitement avec le fil de la roue. L'ensemble est suspendu par l’intermédiaire de 4 profilés en aluminium carrés de 20 x 20 mm permettant un réglage adapté à la hauteur du bac d’évacuation.
Enfin, une jupe en EPDM empêche les éclaboussures à la base du carter.
Je précise que l’utilisation de l’acrylique pour le carter est un choix opportun et pragmatique. Si j’avais le choix, je ferais découper, plier et souder un caisson en acier inox, peut-être un jour …
Commande et pilotage
La turbine est démarrée ou arrêtée par l’intermédiaire de 2 vannes motorisées (24 V) connectées en amont des injecteurs. Les vannes sont pilotées par un relais GSM (fonctionnant avec une carte SIM Free à 2 euros) et un programmateur horaire de type Legrand. Cette combinaison permet de démarrer ou d’arrêter la turbine à distance via des SMS et également de la faire fonctionner au travers de séquences horaires définies via l’horloge. Ces vannes motorisées sont également pilotables manuellement à l’aide d’une clé Allen, c’était un impératif pour moi au cas où les batteries se trouvaient complètement déchargées.
J’ai volontairement laissé de côté l’idée de piloter la turbine en fonction de scénarios plus évolués comme je l’avais initialement pensé, à savoir fermer les vannes en fonction d’une tension de consigne par exemple … J’ai fait le choix de garder le système relativement simple. Cette dimension de l’automatisation n’est cependant pas exclue et fera certainement l’objet d’un prochain prototype, au travers, peut-être, d’un Automate Programmable Industriel (API), d'un Arduino, d'un Raspberry Pi (RPI), d'un ESP32 ou autre …
Régulation
Le servomoteur utilisé en tant que générateur délivre trois tensions alternatives d’environ 90V à 3000 tr/min (vitesse à vide de la turbine). Ces tensions sont ensuite redressées à l’aide d’un pont de diodes à double alternance. La tension continue résultante alimente un régulateur de charge MPPT 10A/100V de la marque Victron.
Lors des phases de charge (Bulk), côté MPPT, la tension plafonne à 40 V et le courant à 3A soit environ 120 W à 1800 tr/min.
La température du servomoteur est également régulée à l’aide de 2 ventilateurs contrôlés par un thermostat numérique, un capteur de température déporté étant placé à l’intérieur du compartiment initial du codeur. Je ne voulais pas prendre le risque de démagnétiser le rotor du servomoteur à cause d’une surchauffe.
Tableau de bord - Armoire électrique - Monitoring
L’armoire électrique de la turbine est structurée en deux parties : une partie 220V dédiée à l’alimentation des différents modules (Relais GSM, Horloge et Alimentation à découpage 24V) et une partie dédiée au courant faible permettant de piloter les vannes motorisées via les différents relais.
Le tableau de bord est présenté sur la face avant de la porte de l’armoire, il affiche un compte-tours mesurant la vitesse de rotation de l’arbre roue/générateur par l’intermédiaire d’un capteur inductif. Je voulais initialement utiliser le capteur à effet Hall du servo mais face à la nécessité d’une électronique supplémentaire j’ai opté pour un capteur bon marché en logeant un aimant en bout d’arbre - sur un disque imprimé en 3D - en lieu et place de l’ancien système de codage. Enfin, un wattmètre affiche les paramètres de tension-intensité-puissance de la production en temps réel.
L’armoire électrique principale est située à l’étage, elle comprend la distribution 220 V classique, ainsi que la partie photovoltaïque/turbine comprenant les 3 régulateurs de charge, une passerelle de communication Venus GX. Un onduleur d'une puissance nominale de 800 watts est placé sous l'armoire électrique.
Les matériels de la marque Victron sont très bien étudiés et proposent une multitude de possibilités en termes de monitoring, au travers de protocoles variés, le portail VRM héberge ainsi l’intégralité de la production et de la consommation via le Venus GX. J’ai pu également jouer avec Node Red pour créer de magnifiques tableaux de bord numériques.
Bilan
L’ensemble fonctionne à merveille, j’ai changé deux fois les roulements du servomoteur et ajouté un deuxième joint spi au niveau du carter moteur et de son arbre, perdant au passage quelques précieux watts …
C’est une belle satisfaction de produire son électricité de manière pérenne et fiable, j’avoue tout de même que ce n’est pas le premier prototype que je réalise, c’est même l’aboutissement de quelques années de réflexions, d’expérimentations et de partage.
Je suis déjà plongé dans la réalisation d’un nouveau prototype, avec une roue au diamètre plus important, qui tournera donc moins vite mais produira un couple plus important. Afin d’exploiter au mieux cette vitesse de rotation réduite, je transforme une base de Machine ASynchrone triphasée (MAS) 6 pôles - 1000 rpm en ajoutant des aimants au rotor, de manière classique ou peut-être en utilisant une implantation de type Halbach array.
Photos
La turbine dans son ensemble.
La turbine en cours de réalisation.
L'armoire électrique principale.
L'armoire électrique de la turbine.
Le carter acrylique de 10 mm d'épaisseur, le réglage en hauteur du support injecteur.
Le détail du capteur inductif qui compte le passage de l'aimant. A 3000 tr/min l'aimant provoquait un léger balourd, j'ai depuis imprimé un nouveau disque support qui est ajouré autour de l'amant afin d'équilibrer le disque est limiter les vibrations.
La face avant du tableau de bord.
La face arrière du tableau de bord.
La turbine fonctionnelle et un prototype en phase de test.